30 bougies pour Audiogram et tout autant de raisons de célébrer!
Le 4 septembre dernier, la maison de disques indépendante Audiogram fêtait son 30e anniversaire d’existence. J’ai assisté à la soirée hommage organisée pour l’occasion à la Société des Arts technologiques (SAT) en compagnie de quelques centaines de personnes qui avaient joyeusement répondu à l’appel. De ce nombre, des artistes de toutes les générations ayant tous, à un moment ou un autre, marqué leur époque, étaient venus célébrer les succès d’une entreprise fondamentale dans le développement de la chanson québécoise. Dans une ambiance de fête et de nightclub, l’équipe d’Audiogram, ainsi que son fondateur Michel Bélanger, respiraient la fierté, et pour cause. Fierté d’avoir traversé le temps sans prendre une seule ride dans une industrie en constants changements, fierté d’avoir bâti une maison où se produisent des artistes talentueux et avant-gardistes tant hier qu’aujourd’hui.

Le chemin parcouru par Audiogram et ses poulains montre que malgré les crises et les tempêtes qui ont secoué l’industrie, un intérêt qui ne s’essouffle jamais pour la culture anglo-américaine, les artistes québécois sont créatifs, pas du tout conformistes, que la chanson québécoise se déploie dans plusieurs styles, invente et se réinvente, crée les tendances sans jamais se contenter de sagement les suivre. Depuis 30 ans, des succès d’estime et publics qui ont fait mentir tous les prophètes de malheur annonçant la mort du disque ou pire, celle de la culture québécoise. Je pense à ces chansons qui ont marqué leur époque, et parfois nos vies, indissociables de souvenirs bien ancrées

dans nos mémoires comme 1990 (Jean Leloup, 1990), Libérez-nous des libéraux (Loco Locass, 2004), La folie en quatre, (Daniel Bélanger, 1992), La jasette (Kevin Parent, 1995), Le Columbarium (Pierre Lapointe), Je voudrais voir la mer (1987, Michel Rivard), Point de mire (Ariane Moffatt), Je t’oublierai, je t’oublierai (Isabelle Boulay), Drinking in L.A. (Bran Van 3000, 1997), Job steady (Zébulon, 1994), Y’a pas grand-chose dans l’ciel à soir (Paul Piché, 1986), On leur a fait croire (Alex Nevsky, 2013) et tant d’autres… Je pense aussi aux plus jeunes recrues de la maison dont les propositions sont étonnantes et marqueront à leur tour, comme David Giguère et son formidable album Casablanca que j’ai usé à la corde ces derniers mois ou encore Jason Bajada et le (très réussi!) résultat de mes bêtises.
Ce mardi, Audiogram lancera Trente, un triple album où 30 artistes ont accepté d’interpréter une chanson de leur choix pour illustrer les trois dernières décennies. Sans artifices, sans arrangements, sans droit de reprise, les artistes ont généreusement accepté de se mettre à nu en enregistrant une chanson de leur choix dans la plus grande simplicité. Une sorte de Journée sans maquillage version instrumentale qui révèle le talent brut de ces artisans comme en témoignent ces extraits choisis : http://audiogram.com/trente/
Cette soirée anniversaire a renforcé une conviction qui m’habite depuis longtemps : malgré les reculs, les défaites historiques et le cynisme qui nous fait sans cesse de l’œil, malgré aussi la tentation de l’anglais qui ne s’affaiblit jamais, la culture québécoise, elle, ne stagne jamais. La force créatrice de nos artisans donne de l’espoir quand on se sent pris dans un cul-de-sac et rappelle qu’on peut malgré tout continuer de faire son chemin.
Myriam D’Arcy

Crédit André Chevrier